Ce que change réellement la réforme de 2025 pour l’entretien de parcours professionnel
La loi n° 2025-989 transforme en profondeur le suivi des salariés en entreprise. En remplaçant l’entretien professionnel par l’entretien de parcours professionnel, elle instaure une logique plus globale, centrée sur l’évolution des compétences, la prévention de l’usure professionnelle et l’anticipation de la fin de carrière. Loin d’un simple ajustement terminologique, cette réforme redéfinit les obligations des employeurs et les droits des salariés.
Un entretien recentré sur le parcours, pas seulement sur la formation
Jusqu’en 2025, l’entretien professionnel portait essentiellement sur les perspectives d’évolution et les besoins de formation. La réforme élargit considérablement ce périmètre. L’entretien de parcours professionnel doit désormais aborder :
les compétences et qualifications mobilisées dans le poste ;
les évolutions possibles du métier et les transformations de l’entreprise ;
les besoins de formation, à court ou moyen terme ;
les projets d’évolution, de mobilité ou de reconversion ;
l’usage du CPF, les abondements éventuels et le recours possible au CEP.
Avec cette nouvelle approche, l’entretien devient un véritable outil de construction du parcours professionnel, sans jamais se confondre avec une évaluation du travail.
Des modalités mieux encadrées
La loi renforce également le cadre opérationnel. L’entretien :
est organisé par l’employeur et se déroule sur le temps de travail ;
doit être conduit par un manager ou un représentant de la direction ;
donne lieu à un écrit remis au salarié.
Les salariés des entreprises de moins de 300 personnes peuvent en outre bénéficier d’un appui du conseil en évolution professionnelle (CEP), et les employeurs peuvent solliciter l’aide de leur OPCO, voire d’organismes externes si un accord collectif le prévoit.
Un calendrier repensé : moins fréquent, mais plus structuré
La réforme modifie profondément la périodicité du dispositif :
un premier entretien doit avoir lieu dans l’année suivant l’embauche ;
puis un entretien tous les quatre ans ;
un état des lieux récapitulatif est réalisé tous les huit ans.
Cet état des lieux vérifie si l’employeur a respecté ses obligations, notamment en matière de formation. Les entreprises disposant d’accords collectifs devront les mettre en conformité avant le 1er octobre 2026.
Une articulation obligatoire avec la visite médicale de mi-carrière.
L’une des grandes innovations de la loi est la création d’un entretien de parcours professionnel dédié, dans les deux mois suivant la visite médicale de mi-carrière.
Ce rendez-vous doit intégrer :
les mesures recommandées par le médecin du travail ;
l’adaptation ou l’aménagement éventuel du poste ;
la prévention des situations d’usure professionnelle ;
les besoins de formation nécessaires pour la seconde partie de carrière ;
les souhaits de mobilité ou de reconversion.
Les conclusions font l’objet d’un document spécifique, distinct des autres entretiens.
Un entretien obligatoire dans les deux années précédant les 60 ans
La loi introduit un autre moment charnière : le premier entretien de parcours intervenant dans les deux années précédant le 60e anniversaire doit porter sur :
les conditions de maintien dans l’emploi ;
les aménagements possibles de fin de carrière, comme le temps partiel ou la retraite progressive ;
les formations permettant d’accompagner cette phase.
L’objectif est clair : préparer la transition et éviter les ruptures subies pour les salariés expérimentés.
Des obligations renforcées pour les entreprises
Cette réforme impose aux employeurs un véritable travail de mise en conformité. Les entreprises devront :
actualiser leurs supports d’entretien et procédures internes ;
former les managers à ce nouvel exercice, distinct de l’évaluation annuelle ;
intégrer les nouvelles échéances (1 an, 4 ans, 8 ans, mi-carrière, pré-60 ans) ;
renégocier les accords d’entreprise ou de branche impactés ;
assurer une traçabilité complète des entretiens et informations transmises.
Au-delà de l’aspect administratif, cette documentation joue un rôle crucial pour démontrer le respect des obligations d’adaptation, de formation et de prévention.
Quels risques en cas de manquement ?
Un entretien non réalisé, incomplet ou mal documenté peut entraîner plusieurs conséquences pour l’employeur. L’état des lieux de huit ans peut déboucher sur un abondement correctif du CPF, mais aussi nourrir des contestations plus larges :
manquement à l’obligation d’adaptation du salarié ;
défaut de prévention de l’usure professionnelle ;
manquement à l’obligation de sécurité.
À l’inverse, un entretien bien mené et correctement documenté constitue un élément de preuve déterminant pour sécuriser les pratiques RH.
Une réforme structurante pour les entreprises
Avec l’entretien de parcours professionnel, la loi de 2025 installe une dynamique continue : gestion des compétences, prévention de l’usure, anticipation de la seconde partie de carrière et préparation des transitions.
Ce dispositif devient un levier stratégique au croisement :
de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ;
de la santé au travail ;
du dialogue social.
Pour les salariés, c’est l’occasion de reprendre la main sur leur trajectoire dans un environnement professionnel en mutation. Pour les entreprises, c’est un changement culturel : passer d’un rendez-vous administratif à un véritable outil de pilotage des parcours.